
The Revolution : “Rien n’était trop grand pour Prince“
À l’occasion de la réédition de Prince and The Revolution:Live, Wendy Melvoin, Lisa Coleman, Bobby Z. et le bassiste Brownmark nous plongent dans les coulisses du Purple Rain Tour en exclusivité pour Funk★U. Shall we begin ?
★★★★★★★★
Funk★U : À quel moment avez-vous réalisé que la tournée Purple Rain serait différente des précédentes ?
Wendy Melvoin : Les mois qui ont précédé la tournée ont été frénétiques. On venait d’enregistrer et de répéter pendant pratiquement une année non-stop, n’est-ce pas, Lisa ?
Lisa Coleman : Oui, nous avions passé énormément de temps à travailler sur les titres et les chorégraphies de la tournée et ces répétitions étaient très intenses, comme toujours avec Prince.
Bobby Z. : Nous avions beaucoup plus répété que d’habitude pour les concerts de Purple Rain. Nous avions déjà beaucoup répété lors du tournage du film, mais l’intensité est encore montée d’un cran lors des répétitions de la tournée. Je me souviens aussi que la scène était beaucoup plus grande que d’habitude et, bien entendu, le succès du film rendait l’enjeu très excitant. Cette fois, contrairement aux tournées précédentes, comme celle de 1999 par exemple, la dynamique était totalement nouvelle car Purple Rain était devenu un véritable phénomène. Du jour au lendemain, nous étions devenus les Beatles.
Brownmark : Pour 1999, tout s’était passé comme d’habitude : nous avions répété, puis nous étions partis sur la route. De mon côté, j’ai senti que cette tournée allait être différente dès l’avant-première de Purple Rain, au Palace Theater de Los Angeles. Le tout Hollywood s’était déplacé et je n’en revenais pas. Tout d’un coup, ça devenait énorme. Je n’avais jamais vu ni vécu une chose pareille…
Aviez-vous pour intention de reproduire sur scène les séquences phares du film lors de la tournée Purple Rain ?
Lisa Coleman : La plus grande partie du concert consistait à adapter le film en situation live, en effet, car pour les spectateurs, voir ces séquences prendre vie sur scène était presque irréel. Nous voulions créer l’impact le plus fort possible.
Bobby Z. : Il fallait reproduire certaines scène du film, mais pas seulement : dans la setlist, on trouvait quelques hits comme « 1999 » ou « Do Me Baby » et d’autres titres que nous jouions depuis des années auxquels venaient s’ajouter ceux de Purple Rain, qui constituait l’essentiel du répertoire. Roy Bennett, le responsable des éclairages qui avait également travaillé sur le film, était aussi chargé d’éclairer les titres de Purple Rain de la même manière qu’à l’écran. Par exemple, tous les spots devenaient rouges pendant « Darling Nikki ».
Brownmark : Bien sûr, il était important de reproduire certaines scènes du film, mais pour moi, cette tournée était simplement la continuation de ce que nous faisions déjà sur scène depuis plusieurs années. Purple Rain montre le groupe au travail d’une manière très fidèle à la réalité. Notre énergie avait nourri le film, puis le film avait nourri la tournée en retour.
Ces concerts sont aussi très chorégraphiés, bien plus que les tournées précédentes.
Bobby Z. : Ces chorégraphies étaient très importantes, et ces concerts avaient parfois un côté théâtral car nous devions, en quelque sorte, reproduire certaines idées de mises en scènes du film. Néanmoins, ces pas de danse alliés à l’énergie live du groupe nous permettaient d’atteindre un niveau supérieur. Brownmark avait organisé les chorégraphies avec Prince pendant le tournage et lors des répétitions de la tournée. Pendant les répétitions, Prince avait l’habitude de blaguer en nous disant : « allez les petits blancs, à votre tour de vous secouer ! » (rires). Si vous regardez attentivement la vidéo de Syracuse, vous pouvez constater que les membres du groupe qui se trouvent sur le devant de la scène ne font pas les mêmes pas que ceux qui sont à l’arrière.
Brownmark : Bobby, Matt (Dr. Fink, ndr) et Lisa bougeaient en même temps en rythme et c’était fascinant à observer, car en général, le chanteur est toujours le seul à bouger sur scène au milieu de son groupe.
La tournée Purple Rain a démarré à la Joe Louis Arena de Detroit le 4 novembre 1984. Quel souvenir gardez-vous de cette première date ?
Lisa Coleman : Physiquement, nous étions déjà prêts depuis plus plusieurs mois, mais d’un point de vue mental, on ne savait pas du tout à quoi s’attendre, et ce n’est que le premier soir de la tournée, à Detroit, que nous avons compris ce qui se passait. Heureusement, nos corps étaient prêts, contrairement à nos esprits (rires).
Wendy Melvoin : Ce premier concert était comme un rêve devenu réalité. J’étais encore une gamine et j’étais fan absolue de la musique de Prince. Avant Detroit, je n’avais joué que dans des clubs avec lui, et tout d’un coup, je me retrouvais dans une arène de 20 000 personnes. Je ne pouvais pas rêver mieux.
Bobby Z. : Ce premier concert était complètement dingue. Avec Prince, les répétitions étaient toujours un moment très privé, mais lorsque le rideau s’est levé à Detroit, nous avons eu droit à une ovation assourdissante, inouïe. Les cris du public étaient tellement forts que nous ne pouvions pas nous entendre jouer « Let’s Go Crazy ». Nous avions pourtant l’habitude de jouer très fort, mais cette fois, le public nous dépassait et c’était un vrai choc.
Brownmark : Au bout de quelques dates, nous avons été obligés de porter des bouchons de protection, mais chaque soir, en entrant sur scène, la salle réagissait tellement fort que je pouvais quand même l’entendre à travers la mousse. C’était comme une tornade en approche, un tremblement sourd qui parvenait à vos oreilles et qui finissait par envahir votre corps tout entier. Chaque fois que je retirais les bouchons, j’étais obligé de les remettre aussitôt car je me sentais agressé par la puissance des décibels.
Bobby Z. : Prince n’aimait pas les moniteurs de retour placées au centre de la scène. Il avait donc installé deux moniteurs de chaque côté de la scène et leur volume était incroyablement élevé. Toute la scène était suramplifiée, mais il parvenait quand même à saisir chaque détail, chaque note jouée. Je ne comprend toujours pas comment il pouvait arriver à nous entendre au milieu de ce vacarme infernal.
Aviez-vous noté un changement dans le public lors de cette tournée ?
Brownmark : Oui, totalement. Lorsque je suis arrivé dans le groupe, Prince venait de terminer la tournée Dirty Mind et il allait démarrer celle de Controversy. À l’époque, son public était essentiellement noir, mais après 1999, j’ai pu constater un changement avec l’arrivée d’un public plus homogène, puis tout s’est transformé lors de la tournée Purple Rain, comme si un tout nouvel auditoire venait de découvrir Prince. Noirs, blancs, portoricains… Toutes les cultures étaient représentées, et c’était quelque chose de très important pour lui.
Bobby Z. : Le succès du film a certainement beaucoup joué dans ce changement. Notre public avait commencé à changer à partir du succès de « Little Red Corvette », qui passait beaucoup sur MTV. C’était un public majoritairement blanc qui venait du rock, le même qui était venu voir les Rolling Stones lors de notre première partie désastreuse en 1981. Ce qu’a l’habitude de dire Lisa est très vrai : Prince a réussi à séduire le public qui l’avait hué ce jour-là, il était parvenu à réaliser le crossover parfait.
Quels sont vos moments préférés du concert ?
Bobby Z. : J’aime particulièrement ses moments calmes. Vers la moitié du show, il y avait un segment au piano qui pouvait s’étirer pendant de longues minutes. C’était presque hypnotique. Depuis mon kit de batterie, je pouvais regarder les autres membres du groupe jouer. Prince était seul au piano, et c’était toujours un spectacle formidable de l’observer. Lors de ces moments, je me rappelais de nos débuts très humbles, et je réalisais tout le chemin qu’il avait parcouru depuis…
Brownmark : Il y en a tellement… Dès que nous entrions sur scène, je ressentais une énergie euphorique qui me catapultait dans la stratosphère. C’est la chose la plus incroyable qui puisse vous arriver dans une vie… Bien plus qu’un extrait du concert, je retiens les réactions de la foule qui étaient phénoménales chaque soir. Je n’oublierai jamais mon premier concert avec Prince lors de la tournée Controversy, à Pittsburgh. Ce soir-là, une fille s’était évanouie et avait dû quitter la salle sur une civière. Le concert n’était même pas commencé ! Je n’en revenais pas, et j’ai compris à cet instant que j’embarquais dans quelque chose d’unique. Arrivé à la tournée Purple Rain, je me suis retrouvé sur le toit du monde.
Lisa Coleman : La toute première partie du concert était un moment particulièrement intense. Je me souviens des fumigènes, des cris du public…
Wendy Melvoin : (hurle) « Let’s go crazy ! ».
Lisa Coleman : C’était comme le décollage d’une fusée, avec le compte à rebours avant de s’envoler.
Wendy Melvoin : Je n’ai pas de moment préféré, car j’envisage les concerts de cette tournée comme un tout, ou plutôt comme une sorte de livre : chaque chanson était comme un chapitre, et ces chapitres racontaient une histoire avec un début, un milieu et une fin… Et vous, quel est votre moment préféré du concert ?
Probablement la version longue de « Baby I’m a Star », avec ses longs jams funky et les invités sur scène.
Lisa Coleman : J’ai revu cette séquence il n’y a pas longtemps, et elle est très fun, c’est vrai. Je me souviens qu’il y avait beaucoup de monde autour de nous, c’était un moment très festif.
Wendy Melvoin : Bruce Springsteen nous avait rejoint sur ce titre à Los Angeles, il me semble. Chaque fois qu’un invité venait jouer avec nous, Prince prenait un malin plaisir à nous faire jouer des breaks compliqués que nous avions appris lors des répétitions, et ces pauvres gars avaient l’air perdus (rires) ! Il a fait ça à Sting aussi…
Vous souvenez-vous d’incidents amusants survenus lors de cette tournée ?
Wendy Melvoin : Vous voulez dire des incidents à la Spinal Tap (rires) ?
Bobby Z. : Lors de l’avant-première de Purple Rain, je devais monter sur scène pour rejoindre le groupe, mais je me suis trompé de porte et je me suis retrouvé tout seul dans une cuisine vide. Il faisait très sombre dans cette pièce, et tout d’un coup, une ombre est sortie de la pénombre : Prince m’a attrapé par le col, comme dans un sketch de Laurel & Hardy, avant de m’entraîner dans la bonne direction.
Lisa Coleman : Oui, on s’est beaucoup perdus dans des cuisines en essayant de chercher la scène pendant cette tournée !
Wendy Melvoin : On criait « Hello Cleveland ! », comme dans Spinal Tap, mais ça ne faisait pas rire Prince. En fait, il détestait ce film, probablement parce qu’il avait dû vivre des choses similaires au début de sa carrière. Ca devait lui rappeler de mauvais souvenirs (rires).
Brownmark : Prince avait l’habitude de se chauffer les cordes vocales avant chaque concert. Il pouvait faire ça n’importe où, dans une loge, dans les toilettes ou dans un couloir. Il poussait des cris aigus surpuissants, à vous arracher les tympans. Un jour, sans le prévenir, j’ai décidé de faire la même chose quelques minutes avant de monter sur scène. Prince est aussitôt entré dans la pièce et m’a demandé ce que j’étais en train de faire. Il avait l’air étonné, puis il s’est mis à rire et m’a dit : « fais-le si ça t’amuse, mais tu n’es pas moi » (rires).
Lors de cette tournée, beaucoup de nouveaux titres ont été crées lors des soundchecks. Quelle était l’importance de ces balances pour Prince ?
Lisa Coleman : Le but de ces soundchecks n’était pas de vérifier les micros, mais de jammer et de nous faire travailler sur de nouvelles idées d’arrangements ou de chansons.
Bobby Z. : Dans l’histoire de la musique, personne ne faisait de soundchecks comme Prince ! Avec lui, les soundchecks n’étaient pas seulement des balances, mais plutôt des répétitions et même parfois des séances d’enregistrement. Il pouvait nous faire rejouer « Let’s Go Crazy » pendant les cinq dernière minutes, mais ce n’était pas le plus important. Très souvent, il nous montrait de nouvelles chansons, avant de les enregistrer grâce au studio mobile installé dans un camion garé à côté de la salle.
Brownmark : On arrivait en ville vers sept ou huit heures du matin. J’étais le seul membre du groupe qui dormait la nuit, et je passais la journée avec Chick, notre garde du corps, à faire un peu de sport, puis vers trois ou quatre heures de l’après-midi, nous avions rendez-vous à la salle, et la musique ne s’arrêtait pas jusqu’à sept heures.
Lisa Coleman : On jouait pendant des heures jusqu’à ce qu’on nous éjecte de la salle car c’était l’heure du concert.
Bobby Z. : Prince ne voulait pas passer deux heures à l’hôtel à attendre l’heure du concert, et dès que la scène était installée dans l’après-midi, il était prêt. On jouait littéralement jusqu’à la dernière seconde et dès que nous étions partis, la salle ouvrait ses portes au public. Et cette habitude a duré pendant toute la tournée jusqu’à la dernière date, à Miami.
Le concert de Syracuse a été diffusé en direct par satellite sur plusieurs chaînes autour du monde. Cela a-t-il ajouté une pression supplémentaire ?
Brownmark : Prince était le perfectionniste ultime. Il contrôlait chaque détail et avait calculé tout ce qui allait se passer à chaque instant du concert en tenant compte des caméras. Il nous avait préparé à cette éventualité et nous avait appris comment « jouer » avec elles.
Wendy Melvoin : Il y avait quand même de la pression car il ne fallait pas faire d’erreurs sur scène. L’équipe technique aussi devait être parfaitement au point, mais toutes ces heures de répétitions ont fini par payer, car ces concerts étaient devenus comme une seconde peau pour nous après six mois de tournée. Nous nous sentions également plus libres sur certains titres, beaucoup plus que lors des premiers concerts.
Lisa Coleman : Parfois, nous faisions des erreurs, mais Prince en faisait aussi. Par exemple, il pouvait démarrer un refrain trop tôt, ou se tromper dans les paroles. Il lui arrivait aussi de courir vers le micro, donner un coup de pied dedans, le rattraper et chanter quelques paroles d’une autre chanson sans prévenir. Si nous n’étions pas synchrones, tout risquait de s’écrouler. Dans ces moments-là, il ne fallait surtout pas le perdre de vue et être encore plus vigilants que d’habitude pour pouvoir le rattraper, car même quand il avait tort, il avait raison (rires) !
Bobby Z. : Syracuse était un des derniers concerts de la tournée, et l’ambiance était proche de celle de la fin de l’année scolaire. Nous étions parfaitement au point car nous étions sur la route depuis plus de six mois. Syracuse était donc simplement une date de la tournée Purple Rain que nous devions assurer comme toutes les autres, avec une nuance : nos concerts étaient souvent filmés pour les écrans de la salle, mais le fait de savoir que celui-ci était retransmis par satellite ajoutait une pression supplémentaire sur nos épaules. En 1985, c’était quelque chose d’assez nouveau et nous dépendions entièrement cette nouvelle technologie. Prince aussi devait ressentir une certaine pression, car c’était un moment historique pour lui. Il faut se rappeler aussi que ce show avait été était retransmis dans le monde entier car nous n’allions pas effectuer de tournée mondiale avec Purple Rain.
Comment avez-vous réagi à cette annonce ?
Bobby Z. : J’ai été très déçu en l’apprenant. J’imaginais que nous allions faire une pause avant de reprendre la tournée, car l’intérêt pour Purple Rain était encore très élevé — et il l’est encore aujourd’hui. J’ai été également déçu pour les fans, mais j’étais aussi fatigué après avoir traversé un cycle de trois ans incluant l’enregistrement de l’album, le tournage du film puis la tournée. Prince n’avait jamais passé autant de temps sur un projet. Nous étions tous exténués, mais nous aurions pu continuer et les concerts européens et japonais auraient été extraordinaires, j’en suis persuadé.
Brownmark : Nous avions travaillé depuis fin 1982 pour atteindre ce but. Nous étions proches du burn-out pendant cette tournée, mais nous aurions dû la poursuivre à travers le monde car la récompense aurait été phénoménale au vu de ce que nous avions réalisé rien qu’aux États-Unis.
Wendy Melvoin : Nous étions forcément déçus, mais nous savions pourquoi il avait pris cette décision et nous l’avons soutenu. Nous savions aussi que ce n’était qu’une question de temps et que nous allions voyager dans le reste du monde avec Parade, et que ces concerts allaient être encore meilleurs. La tournée Purple Rain était fantastique, c’était du grand spectacle, mais l’expression musicale de la tournée Parade était plus riche et satisfaisante à mes yeux.
Bobby Z. : Lorsque nous sommes venus en Europe l’année suivante pour la tournée Parade, nous avons pu entrevoir un aperçu de ce que la tournée mondiale Purple Rain aurait pu donner. La réaction du public aurait sans doute été encore plus forte qu’aux États-Unis, car les fans européens de Prince sont encore plus enthousiastes que les fans américains.
Selon vous, pourquoi Prince a-t-il décidé de ne pas poursuivre la tournée Purple Rain en Europe et dans le reste du monde ?
Bobby Z. : Il avait déjà la tête ailleurs. Around the World in a Day était quasiment terminé, mixé et masterisé avant la première date de la tournée à Detroit.
Brownmark : Quand il nous a annoncé qu’il n’y aurait pas de tournée mondiale, je lui ai demandé pourquoi, il m’a dit précisément : « Je m’ennuie » (« I’m bored »).
Wendy Melvoin : Le mot est un peu fort, mais il y avait de ça.
Lisa Coleman : Je dirais plutôt « impatient » (« restless »).
Bobby Z. : En tournée, Prince s’ennuyait souvent au bout de quelques dates, et quand il s’ennuyait, il voulait passer à autre chose le plus vite possible.
D’après plusieurs témoignages, la tournée Purple Rain est aussi le moment où Prince a commencé à s’éloigner des membres de The Revolution.
Wendy Melvoin : Non. Ça, c’est arrivé plus tard… Nous étions vraiment soudés pendant la création de Purple Rain, Around the World in a Day, Parade et d’une grande partie de Sign’O’The Times. Nous formions alors une véritable unité créative avant qu’il ne décide de passer à autre chose.
Rétrospectivement, pensez-vous que le phénomène Purple Rain était devenu trop grand, trop difficile à supporter pour Prince ?
Bobby Z. : Rien n’était trop grand pour Prince ! Il voulait devenir une superstar et il avait atteint son objectif. Je crois aussi qu’il pensait pouvoir supporter toute cette pression grâce à la perspective d’Around the World in a Day et du projet Parade qui commençait à germer. Le phénomène Purple Rain était gigantesque, mais Prince avait du mal à apprécier ce moment car il vivait toujours dans le futur. « Nous allons faire ci, puis nous allons faire ça… » Et il pensait déjà à ce qu’il allait faire après Purple Rain pendant qu’il enregistrait l’album !
Prince and The Revolution:Live est réédité à partir de nouvelles sources audio-vidéos retrouvées dans le Vault. Si vous deviez exhumer une performance live filmée de The Revolution, laquelle choisiriez-vous ?
Wendy Melvoin : Sans hésiter, le concert de l’anniversaire de Prince à Detroit pendant la tournée Parade.
Lisa Coleman : Moi aussi.
Brownmark : La version live d’« America » filmée à Nice, lors du tournage d’Under the Cherry Moon, car elle incarne parfaitement ce pourquoi nous avions travaillé pendant des années. Prince voulait nous voir monter sur scène pour exprimer nos propres personnalités, et c’est exactement ce qui se passe dans cette vidéo. Le groove de cette version est explosif, et la version longue que nous avions enregistrée en studio devait dépasser les trente minutes. Prince a dû l’éditer pour qu’elle rentre dans l’album, mais elle reste une chanson parfaite pour jammer pendant des heures.
Bobby Z. : Je me souviens très bien du tournage de cette vidéo live d’« America » filmée sous un chapiteau à Nice dans une chaleur infernale, un moment incroyable… Il y a sans doute plein d’autres vidéos intéressantes, mais cette vidéo capture Prince and the Revolution à leur sommet. Le fait qu’elle ait été tournée en France n’est pas anodin non plus : Prince s’était inspiré de Versailles pour construire Paisley Park, et chaque visite en France était un moyen pour lui de s’enrichir culturellement. La France a également joué un grand rôle dans l’histoire de The Revolution, et personnellement, je n’oublierai jamais le dernier concert que nous avons donné à Paris, il y a quelques années. Plus généralement, je garde un très bon souvenir du tournage de la vidéo de « Raspberry Beret », et j’aime beaucoup nos représentions animées dans la version finale du clip. La chorégraphie de Brownmark à la fin du clip de « When Doves Cry » est très réussie aussi.
The Revolution s’est reformé en 2016, l’année de la disparition de Prince, et vous êtes venus jouer en Europe en 2019. Avez-vous l’intention de prolonger cette tournée ?
Bobby Z. : Nous étions censés revenir en Europe, mais le covid en a décidé autrement…
Lisa Coleman : Nous aimerions beaucoup revenir jouer à Paris avec The Revolution, mais si nous devons rejouer ensemble, il faudrait imaginer quelque chose d’entièrement nouveau, car pour nous, ces concerts sont encore une épreuve très douloureuse émotionnellement parlant. Prince n’est plus là, et nous ne voulons pas non plus engager un imitateur à sa place. Peut-être que les fans seront chargés de chanter ces titres à sa place, car ses chansons appartiennent à tout le monde désormais.
Propos recueillis par Christophe Geudin. Photos : Nancy Bundt (©PRN MusicCorp). Remerciements à Yazid Manou.
Prince and The Revolution:Live (Legacy Recordings). Disponible le 3 juin en coffrets triple-vinyle et 2CD/Blu-ray.

Prince en couverture de Jazz Magazine n°736
Cinq ans après sa disparition en avril 2016, Prince est à l’honneur dans Jazz Magazine n°736 à l’occasion d’un “dossier royal”.
Au programme, un nouvel entretien avec le batteur Michael Bland, un sujet sur le side-project Madhouse, une sélection des meilleurs hommages jazz, un focus sur les concerts du New Morning et une “histoire orale” incluant des propos exclusifs (entre autres) de Bobby Z., Wendy Melvoin, Lisa Coleman, Dr. Fink, André Cymone, Eric Leeds, Sheila E., Dez Dickerson, Pepé Willie, Mayte, Larry Graham et Nile Rodgers.
Jazz Magazine n°736 (avril 2021) disponible en kiosques à partir du 31 mars.

“Prince & The Revolution: Live” en vidéo et en streaming
Le Prince Estate, en partenariat avec YouTube, organisera pendant trois jours l’événement streaming Prince and the Revolution: Live, d’après le concert historique du 30 mars 1985 au Carrier Dome de Syracuse (état de New York). Prince and the Revolution: Live capture Prince et son célèbre groupe à leur sommet lors du Purple Rain Tour dans le premier concert live officiel de Prince diffusé à la télévision et en vidéo domestique.
Interprété par un groupe exceptionnel et parfaitement au point —avec Wendy Melvoin, Lisa Coleman, Dr. Fink, Mark Brown, Eric Leeds, Bobby Z. et quelques special guests—le concert de Syracuse comprend les hits de Purple Rain tels “Let’s Go Crazy”, “When Doves Cry”, “I Would Die 4 U” et “Purple Rain” aux côtés d’anciens titres comme “1999”, “Little Red Corvette” et “How Come U Don’t Call Me Anymore.” (tracklisting complet ci-dessous)
Afin de célébrer la diffusion en streaming de Prince and the Revolution: Live, le Prince Estate et YouTube organiseront un événement vidéo le mercredi 15 mai à 2h du matin (heure française). Une heure avant le lancement du concert, à 1h du matin, les fans auront l’opportunité de participer à une séance spéciale de questions-réponses avec Bobby Z., le batteur de The Revolution. Cette discussion sera modérée par Andrea Swensson, membre de la station de radio publique du Minnesota The Current.
Prince and the Revolution: Live sera disponible sur la chaîne YouTube officielle de Prince pendant trois jours seulement. L’événement streaming prendra fin à 7h du matin le lundi 18 mai. En collaboration avec YouTube et Google, cet événement streaming soutient le fonds de solidarité de l’OMS contre le COVID-19 (géré par la foundation de l’ONU et la Swiss Philanthropy Foundation). Chaque don des internautes sera comptabilisé par Google (Google.org reversera 2 dollars pour chaque dollar récolté au-dessus de la somme de 5000 dollars). Tous les détails sur https://covid19responsefund.org/
Ce concert avait été publié en 1985 et VHS et LaserDisc, puis en DVD en 2017 dans le coffret Purple Rain Remastered & Deluxe Edition. La partie audio de ce concert a été remasterisée par Bernie Grundman, l’ingénieur du son de longue date de Prince, et sera disponible pour la première fois en streaming et téléchargement sur toutes les plateformes le vendredi 15 mai.
Tracklisting
Let’s Go Crazy (6:03)
- Delirious (2:51)
- 1999 (5:51)
- Little Red Corvette (3:39)
- Take Me With U (4:57)
- Yankee Doodle Dandy (3:53)
- Do Me Baby (4:51)
- Irresistible Bitch (1:56)
- Possessed (4:25)
- How Come You Don’t Call Me Anymore (7:19)
- Let’s Pretend We’re Married (2:11)
- International Lover (2:01)
- God (7:46)
- Computer Blue (4:15)
- Darling Nikki (3:30)
- The Beautiful Ones (6:50)
- When Doves Cry (9:29)
- I Would Die 4 U (3:27)
- Baby I’m A Star (10:57)
- Purple Rain (19:26)

Bobby Z : “1999 a été un tournant dans la carrière de Prince”
Dans le premier entretien d’une série dédiée à la réédition Super Deluxe de 1999, Bobby Z., le batteur historique de The Revolution, se remémore le premier tournant artistique décisif de la carrière de Prince.
★★★★★★★
Funk★U : L’histoire de l’album 1999 débute à la fin de l’année 1981. Quels souvenirs gardez-vous de cette période ?
Bobby Z : Pour moi, cette histoire démarre lors des concerts en première partie des Rolling Stones en octobre 1981. Prince enregistrait déjà très vite à cette époque, et la tournée Controversy allait commencer six ou huit semaines plus tard. Ces concerts avec les Stones ont été un désastre, mais Prince a compris à ce moment-là qu’il se trouvait à un tournant. Lisa (Coleman, ndr.) raconte ça très bien : quand il s’est fait jeter de scène, il a immédiatement compris que s’il voulait devenir une star, il devait convaincre ce type de public. C’était le genre de défaite qui vous montre la voie à suivre. Du coup, dans 1999, il y a des titres rock comme « Little Red Corvette » et d’autres plus pop et funky comme « 1999 » ou « DMSR ». C’était une vraie démarche intellectuelle, et 1999 a été un tournant dans la carrière de Prince.
À quel moment avez-vous entendu parler du projet 1999 ?
C’était pendant la tournée Controversy. Nous voyagions dans le Sud des États-Unis pour rejoindre la tournée de Rick James. On s’était arrêtés dans un motel dont l’enseigne indiquait « Free HBO » (chaîne payante du câble, ndr.). Au début des années 1980, c’était quelque chose car le câble n’était pas diffusé partout. Une fois dans nos chambres, nous avons allumé la TV et nous sommes tombés sur le film The Man Who Saw Tomorrow (Robert Guenette, 1981, ndr.), qui parlait de Nostradamus et ses quatrains sur une narration d’Orson Welles. À la fin du film, ses quatrains annoncent la fin du monde, ravagé par une explosion nucléaire, en 1999… Le lendemain matin, on se retrouve dans le tourbus pour nous rendre à la salle de concert où Prince nous attendait — il était toujours en avance, car il avait hâte que l’équipement arrive pour pouvoir jouer du piano. Pendant le trajet, nous démarrons une conversation de machine à café qui tourne autour du film de la veille. On se disait que Prince aurait dû l’adorer car il s’intéressait beaucoup à l’idée d’apocalypse. En arrivant à la salle, on lui demande s’il a vu le film. Là, il nous tend un morceau de papier où il avait griffonné les paroles de « 1999 ». En l’espace d’une nuit, il avait transformé ce film en une chanson. Il avait mélangé cette histoire de Nostradamus avec un thème festif, la fin du monde avec une fête géante (rires) !
Vous n’avez pas participé à l’enregistrement de l’album 1999, mais vous souvenez-vous de votre réaction le jour où vous l’avez découvert ?
De For You, le premier album de Prince, jusqu’à Purple Rain, je suis crédité comme « l’assistant envoyé du ciel » ou je ne sais quoi. Depuis le début, j’apportais quand même des éléments à ces chansons, notamment les percussions synthétiques sur 1999. Je ne jouais pas les parties présentes sur les albums, mais il y avait quelques petits morceaux auxquels j’avais contribué. Prince avait tout dans sa tête, de la même manière que Beethoven, Mozart ou Paganini consignaient tout sur des partitions. Prince avait tout en tête, mais il voulait que vous participiez à ses idées, même s’il pouvait tout jouer lui-même. La première fois que je l’ai rencontré, en 1974, il s’enregistrait tout seul au piano, et c’est comme ça que sa carrière s’est terminée avec la tournée Piano and Microphone. Entre-temps, il avait eu besoin d’être entouré par des musiciens, ou plutôt un gang, une armée, pour incarner l’aspect visuel de sa musique sur scène.
La première chanson de 1999 que j’ai entendu, c’était « Let’s Pretend We’re Married » et ça m’a soufflé, surtout le son des cuivres synthétiques. La définition du Minneapolis Sound est très simple : c’est Prince qui joue des cuivres avec un synthétiseur. À cette époque, il commençait aussi à enregistrer chez lui et ça a tout changé. Il n’avait plus besoin d’aller à Los Angeles à Sunset Sound, où dans les studios de Minneapolis qui coûtaient aussi très cher. Il n’avait plus de limites, il pouvait désormais perfectionner ses chansons.
L’édition Super Deluxe de 1999 contient une vingtaine de titres inédits enregistrés autour de la création de l’album. Jouez-vous sur quelques-uns de ces titres ?
Oui, plusieurs. Sur « Bold Generation » ? Oh oui, nous n’arrêtions pas de la jouer en répétitions, tout comme « I Can’t Stop This Feeling I Got ». Ça fait partie des nombreuses chansons qu’il retravaillait sans cesse et je crois qu’elle est devenue « New Power Generation » plus tard. J’aimais beaucoup sa mélodie, c’était une chanson très énergique et très fun à jouer. Prince avait l’habitude de tester ses chansons de toutes les manières possibles, seul ou avec le groupe. Par exemple, la version d’« Irresistible Bitch » de la tournée Purple Rain n’a rien à voir avec celle créée en studio. C’était un monstre uptempo alors qu’elle est plus lente, sombre et mystérieuse dans sa version originale. Ça me fait penser aux Beatles qui avaient enregistré une version lente et une autre plus rapide de « Revolution »… Je n’ai pas les autres titres de la réédition en tête, mais je sais que je ne joue pas sur « Purple Music », mais c’est encore une chanson sur laquelle nous avions passé beaucoup de temps en répétitions.
Étonnement, le nom de The Revolution apparaît sur la pochette de 1999, alors que le groupe sera créé l’année suivante. Savez-vous pourquoi ?
Prince adorait glisser des indices dans ses chansons et sur ses pochettes de disque. Je crois qu’il a fait ça pour plusieurs raisons : il avait déjà l’idée du film Purple Rain en tête et il savait que le groupe devait apparaître dans le film. Je pense aussi qu’il se posait la question de savoir s’il avait vraiment envie de partager l’affiche avec son groupe, comme si cette simple indication lui servait de test. Le line-up de notre groupe était également en train de changer. Dez (Dickerson, ndr.) allait être remplacé par Wendy (Melvoin, ndr.), qui allait apporter une bouffée d’air frais et compléter le puzzle. Dès 1977, Prince n’arrêtait de nous parler de sa vision du groupe, de son ratio homme-femme, blanc-noir, et lorsque Wendy est arrivée, tout s’est mis en place. C’est pour cette raison qu’il a choisi de créditer l’album Purple Rain à Prince and The Revolution. Il y a toujours eu cette part de mystère chez Prince, mais je l’ai assez bien connu pour en tirer ces conclusions.
L’un des temps forts de l’édition Super Deluxe de 1999 est l’album live enregistré au Masonic Temple de Detroit, le 30 novembre 1982. Le son époustouflant de cette performance permet de mieux apprécier les nuances de votre jeu, notamment sur « Do Me Baby ».
Mon frère, David Z., a mixé ce concert et sa qualité sonore retranscrit très bien comment les morceaux crées en studio étaient adaptés pour la scène. La vidéo du concert de Houston est superbe aussi. Elle capture le moment précis où Prince devient un des plus grands performers de tous les temps : celui où il grimpe sur les enceintes à la fin de « Do Me Baby », et qu’il hurle en tenant la note. J’en avais la chair de poule tous les soirs et c’était un pied de jouer cette chanson. Elle est si riche et nuancée, et nous avions passé beaucoup de temps dessus lors des répétitions de la tournée Controversy. Il fallait rester tight sur un tempo lent pendant près de 10 minutes, ce qui est très difficile… Ces répétitions étaient vitales pour Prince, c’était presque une question de vie ou de mort et il emmenait tout le groupe avec lui. C’était les Jeux Olympiques tous les jours de la semaine…
Trente-sept ans plus tard, que retenez-vous de cette tournée ?
C’était si excitant d’être là avec The Time et Vanity 6. Prince avait crée tous les personnages de sa pièce, et nous la jouions chaque soir sur scène. Bien sûr, les tournées peuvent être difficiles parfois. Prince était le patron, et tout le ponde venait lui faire part de ses problèmes. Le vrai problème a eu lieu quand Jimmy Jam et Terry Lewis de The Time ont été coincés à Atlanta dans une tempête de neige et n’avaient pas pu rejoindre la tournée, car ils produisaient en secret l’album de The SOS Band. Ça a été le drame, ça s’est mal terminé, la situation était très confuse, mais ça n’enlève en rien au grand souvenir que je garde du 1999 Tour.
Sur cette tournée, vous mélangez votre jeu organique aux sonorités électroniques de la LinnDrum. Comment vous êtes-vous adapté à ce style ?
En réalité, c’était très simple. La LinnDrum venait tout juste de sortir, et il y avait aussi les percussions synthétiques de Pearl, qu’on entend sur les tom-toms de « Little Red Corvette », les bruits de bombe sur « 1999 » et dans « Sexuality », qui a le son de batterie le plus cool de l’univers. Don Batts, notre ingénieur du son, avait construit une interface qui reliait la LinnDrum aux pads, et grâce à ça et d’autres câblages assez complexes, je pouvais véritablement « jouer » avec cette machine, comme Prince l’avait imaginé. L’inconvénient, c’était que toute cette technologie était nouvelle et parfois très fragile, ce qui nécessitait un temps fou de préparation avant chaque concert.
Que pensez-vous du jeu de batterie de Prince ?
Je l’ai beaucoup vu jouer de la batterie, et ce qu’il faisait en studio était très impressionnant. Comme il ne jouait pas tout le temps, il devait se reconcentrer chaque fois qu’il s’asseyait derrière le kit, mais ses parties étaient toujours parfaites. C’était aussi un batteur très mélodique, ce qui est plutôt rare. Chacune de ses notes avait de la valeur, et c’était la même chose pour ses programmations de beats : écoutez « When Doves Cry », il n’y a que des tom-toms avec du delay, mais leur musicalité est incroyable.
Quels sont les projets de Bobby Z. en 2020 ?
The Revolution vient d’annoncer un concert en Hollande et un autre à Hambourg pour l’été prochain. J’espère que nous allons revenir jouer à Paris car c’était une expérience incroyable pour nous tous. Les concerts que j’ai donné à Paris avec Prince, puis The Revolution, restent les plus grand moments de ma carrière. Et je sais que Paris tenait une place à part dans le cœur de Prince.
Propos recueillis par Christophe Geudin
Prince 1999 Super Deluxe (Rhino/Warner). Coffrets 5 CD + DVD, 10 LPs+DVD et versions digitales disponibles le 29 novembre.

The Revolution en concert à Paris
En partenariat avec Veryshow, Funk★U est heureux d’annoncer la venue française de The Revolution, les légendaires accompagnateurs de Prince entre 1983 et 1986.
Composé de Wendy Melvoin (guitare, chant), Lisa Coleman (claviers, choeurs), Bobby Z. (batterie), Brownmark (basse) et Dr. Fink (claviers), The Revolution ont participé aux albums Purple Rain (1984), Around the World in a Day (1985) et Parade, la bande-son du long-métrage Under The Cherry Moon, en 1986.
33 ans après leur dernière venue en France, au Zénith de Paris en août 1986, The Revolution donnera un concert unique dans la capitale le 11 février 2019. Billets en vente sur tous les réseaux le vendredi 18 mai à 10 heures (BILLETERIE).
Ladies and gentlemen… Please welcome… THE REVOLUTION !
Communiqué officiel :
Prince a eu l’occasion de jouer avec de nombreux musiciens tout au long de ses quarante années de carrière, mais ses plus célèbres alliés resteront toujours : Bobby Z, Wendy Melvoin, Lisa Coleman, Matt Fink et Brownmark : THE REVOLUTION. The Revolution est sans aucun doute le groupe qui l’a propulsé au-devant de la scène avec ses plus beaux tubes dont, notamment, la célèbre bande originale du film Purple Rain en 1984 ainsi que 1999, Around The world in a Day, Parade et Sign O’The times.
The Revolution devient alors l’un des plus grands groupes des années 80-90 et vend plus de 20 millions d’albums. Prince se retrouve en tête des charts pendant 24 semaines et remporte deux Grammy Awards et un Oscar. C’est d’ailleurs la première fois qu’un artiste remporte simultanément le titre du meilleur album, du meilleur single et du meilleur film. Le groupe se sépare ensuite officiellement en 1986, mais tous les membres sont restés très proches du chanteur. « Nous sommes tous restés en contact, même avec Prince, et nous pensions parfois à rejouer tous ensemble » raconte Brownmark, le bassiste du groupe. Les membres de The Revolution ont eu par la suite beaucoup de succès dans leurs carrières solo. Melvoin et Coleman n’ont jamais cessé de travailler ensemble et ont remportés de nombreuses récompenses en tant que compositeurs pour des films ou pour la télévision. Bobby Z et Fink ont quant à eux continué de travailler avec de nombreux artistes nationaux ou internationaux dans leur propre studio d’enregistrement. Brownmark a fondé le groupe Mazarati et travaille actuellement sur de nombreux projets avec sa société de production BrownmarkNation.
Les membres de The Revolution sont restés particulièrement silencieux depuis la disparition de leur ami et mentor en avril 2016. Ils font trois concerts complets au First Avenue, Minneapolis, lieu mythique de la création de « Purple Rain », mais les questions demeurent : « combien de dates allons-nous pouvoir faire, est-ce que les fans seront toujours là ? » se demande la chateuse Wendy Melvoin. Mais les fans ont bien répondu présents à chacun de leurs concerts et le groupe décide alors de repartir sur la route, après avoir célébré le premier anniversaire de la disparition de Prince au Paisley Park en 2017, dans le Minnesota. La réponse est finalement très claire : le plus important est de rassembler tout le monde dans l’amour de la musique, et les fans sont bien présents dans le monde entier pour venir les écouter.
Aujourd’hui, presque trente ans depuis leur tournée Européenne avec Prince (la Parade ‘Hit and run’ en août 1986), le groupe sera de retour en Europe en février 2019 avec des concerts exceptionnels dont celui du 11 février prochain à la Cigale, à ne manquer sous aucun prétexte.
Bobby Z, le batteur du groupe se dit « très excité de revenir en Europe », il se rappelle la première fois qu’ils sont venus en 1981, le groupe était à la fois très excité et intimidé et Prince n’évoquait que de bons souvenirs de ses concerts en Europe. « Il savait qu’il pouvait compter sur nous » explique la pianiste Lisa Coleman « On marche sur la lune ensemble » disait-il. « Vous êtes les seuls à comprendre ce que je comprends ». Bobby Z rajoute également « ce groupe c’était comme une famille ou un gang et ça nous rassurait ». « Je pense que chaque membre de The Revolution est vraiment unique » ajoute Wendy Melvoin. «Et puisqu’on ressent tous un peu la même chose, rassemblons-nous à nouveau avec grâce et intégrité. Nous sommes encore debout et en vie alors faisons ces concerts tant qu’on le peut encore ! »
The Revolution est donc désormais prêt à retransmettre l’énergie unique que Prince a pu laisser autour de lui et compte bien nous la faire partager le 11 février prochain à la Cigale. Les fans de Prince et du groupe se retrouveront pour célébrer des valeurs fortes de paix, d’amour et d’espoir. « Prince disait que la musique est un remède » nous rappelle Bobby le batteur du groupe, « les gens en ont besoin et nous aussi, et c’est bien pour cela qu’on essaye de la rendre aussi authentique que possible. En son honneur, nous donnerons tout ce qu’on a ».

Live report : The Revolution, Philadelphia (Theater of the Living Arts 04/30/2017)
Parmi toutes les performances des cérémonies d’Awards et les nombreux artistes essayant de rendre hommage à Prince, son plus grand tribute live parcourt en ce moment les États-Unis sous la forme de son backing-band le plus célèbre, The Revolution. Plus de 30 ans après la séparation du groupe, ses membres sont toujours aussi en place. Ils se sont même améliorés avec l’âge. Dr. Fink et Lisa Coleman électrisent l’auditoire grâce à la maitrise de leurs claviers tandis que Bobby Z. continue de marteler le rythme qui menace de faire sécrouler le Living Theater de Philadelphie. Les fans dansent et se pincent presque en voyant Brown Mark slapper le funk et Wendy Melvoin distille des licks de guitare en démontrant à la fois son talent personnel et son lien très profond avec la musique de Prince. Afin de renforcer l’énergie vocale de Brown Mark et Wendy, le groupe a invité Stokley Williams de Mint Condition (et natif du Minnesota), que Wendy présente comme un des chanteurs préférés de Prince. Stokley contribue à la performance en reproduisant le falsetto des hits mémorables, et il ajoute également sa propre voix instantanément identifiable à d’autre classiques pour le grand plaisir de ses (nouveaux) fans.
Tout au long de la performance, Wendy lutte contre les larmes en racontant ses souvenirs de Prince et l’impact que le musicien a exercé sur leurs vies. Lisa et Wendy rendent un hommage personnel en interprétant en duo vocal/instrumental de leur création commune “Sometimes it Snows in April”. Le public a aussi droit à une surprise inattendue lorsque le groupe se plonge dans le fameux Vault, en jouant “Destiny” et “Roadhouse Garden”. Cette soirée est une célébration et donne à chacun l’impression de se retrouver dans un club de Minneapolis au coeur des années 1980
Malheureusement, nous n’aurons plus l’occasion d’assister à une autre performance sidérante de Prince. Par chance, The Revolution a trouvé le moyen de réjouir ses fans tout en célébrant sa mémoire. Grâce à eux, le Minneapolis Sound n’a pas fini de résonner aux quatre coins du globe.
Adam Kita
Setlist
- Computer Blue
- America
- Mountains
- Automatic
- Take Me With You
- Uptown
- D.M.S.R.
- Destiny
- Roadhouse Garden
- Raspberry Beret
- Erotic City
- Let’s Work
- 1999
- Paisley Park
- Controversy/ Mutiny
- Sometimes it Snows in April
- Let’s Go Crazy
- Delirious
- Kiss
- When Doves Cry
- Purple Rain
Encore
- I Would Die 4 U
- Baby I’m a Star

“Let’s Go Crazy, Prince and the Making of Purple Rain”
À défaut d’une édition Deluxe célébrant en 2014 les 30 ans du combo film/album Purple Rain, Alan Light, journaliste à Rolling Stone, Spin et Vibe revient sur le phénomène pop qui balaya l’été 1984. Basé sur des entretiens de première main en compagnie de Wendy Melvoin, Lisa Coleman, Matt Fink, Bobby Z., Jill Jones et du tour manager Alan Leeds, Let’s Go Crazy, Prince and the Making of Purple Rain décrit de l’intérieur le quotidien de The Revolution, des prémices d’un projet fou à la dépression post-succès en passant par le zénith de la Princemania.
Qui aurait bien pu miser sur un long-métrage réalisé au fin fond du Minnesota par un réalisateur débutant (Albert Magnoli) avec pour vedette une popstar semi-inconnue du grand public et un casting d’acteurs en grande partie non-professionnels ? L’enquête d’Alan Light, qui a rencontré Prince plusieurs fois au cours des années 1990 et 2000, insiste à juste titre sur l’importance du tandem Cavallo-Fargnoli, alias la spaghetti connection, et leur pouvoir de persuasion que n’aurait pas renié les personnages de la saga sicilienne de Coppola. Une fois tombées les portes d’Hollywood, Let’s Go Crazy décrit un difficile tournage hivernal dans des conditions climatiques extrêmes compensé par la dynamique collective choisie par Prince au profit des membres de The Revolution. Un des rares moments d’ouverture d’une carrière marquée par un individualisme forcené, et aussi l’occasion de rares épanchements personnels racontés par Susannah Melvoin et l’ingénieure du son Susan Rogers. Une source de tension également : le livre rapporte les différents irréconciliables entre Prince et un Morris Day sous influence, sans oublier les clivages personnels à l’intérieur de The Revolution, notamment lors de l’arrivée de Wendy à la place de Dez Dickerson. Les dernières semaines de la gigantesque tournée Purple Rain sont aussi l’objet de pages relatant l’épuisement moral et physique du groupe, et surtout l’impossibilité pour son leader de reproduire un momentum identique lors de la suite de sa carrière (“après Purple Rain, Prince n’a pas su allier son art, son besoin de promotion et sa célébrité”, observe Lisa Coleman).
Tout en soulignant l’importance de l’album et en faisant preuve d’objectivité sur les nombreux défauts du long-métrage, Alan Light resitue la saga Purple Rain dans son contexte historique, celui de l’Amérique d’un Ronald Reagan obsédé par la – vraie- guerre des étoiles, d’une Amérique à la scène pop où les rivaux du kid Minnéapolitain ont pour nom Michael Jackson et Bruce Springsteen (rapprochements pertinents entre les trajectoires siamoises de Purple Rain et Born in the USA) et une Amérique glam où Prince a crée ses propres codes musicaux, vestimentaires et même capillaires (“On a détruit la couche d’ozone !”, s’amuse encore Lisa Coleman). Dig if U will the picture…
Jacques Trémolin
Alan Light Let’s Go Crazy, Prince and the Making of Purple Rain *** (Atria Books) 300 pages. Disponible uniquement en anglais.

Une tenue de Prince et un tambourin aux enchères
Le site américain Gotta Have Rock & Roll vendra le 7 décembre prochain une tenue de Prince portée notamment par le musicien pendant le tournage de Under The Cherry Moon en 1985. La mise à prix est fixée à $4000. Une boucle d’oreille du Lovesexy tour ($100) et un tambourin ($100) appartenant au batteur Bobby Z sont également proposés à la vente. Bonne chance !